Les mesures phares de la loi Pinel sont :
I) Des dispositifs non soumis au statut des baux commerciaux devenus plus attractifs.
Le législateur donne une existence légale à la convention d’occupation précaire en reprenant dans un nouvel article L.145-5-1 du Code de commerce, suivant la définition donnée depuis 2003 par la Cour de cassation : « Est une convention d’occupation précaire la convention qui se caractérise, quelle que soit sa durée, par le fait que l’occupation des lieux n’est autorisée qu’à raison de circonstances particulières indépendantes de la seule volonté des parties. ».
– Le bail de courte durée :
Les parties peuvent signer un ou plusieurs baux de courte durée dans la limite d’une durée globale portée à trois ans au lieu de deux ans jusqu’à présent (24 plus exactement).
En outre jusqu’à présent, si au terme du bail le locataire restait dans les locaux sans opposition du bailleur, il s’opérait automatiquement un nouveau bail soumis au statut des baux commerciaux (formation tacite d’un nouveau bail).
Le texte adopté décale d’un mois, à compter du terme du bail de courte durée, la date à laquelle se forme automatiquement un bail commercial dans un tel cas.
II) Une liberté contractuelle plus limitée dans les relations entre locataires et bailleurs
– Etats des lieux d’entrée et de sortie des locaux :
La loi impose désormais aux bailleurs et aux locataires d’un bail commercial, d’un bail professionnel ou d’un bail de courte durée, de procéder à un état des lieux lors de la prise de possession des locaux puis lors de leur restitution.
Cette obligation s’impose également en cas de cession de bail ou de fonds de commerce.
A défaut, le bailleur ne pourra se prévaloir de l’article 1731 du Code civil en vertu duquel : « S’il n’a pas été fait d’état des lieux, le preneur est présumé les avoir reçus en bon état de réparations locatives, et doit les rendre tels, sauf la preuve contraire. ».
– Nouvelle sanction des clauses contraires au statut
Jusqu’à présent, les clauses du bail qui avaient pour effet de faire échec aux dispositions d’ordre public du statut (cf. articles L. 145-15 et 16 du Code de commerce) étaient passibles de nullité.
Toutefois l’action en nullité se prescrivant en matière de baux par deux ans, cela limitait grandement la possibilité pour les locataires de contester de telles clauses.
La loi Pinel répute désormais non écrite les clauses litigieuses ce qui a pour effet de rendre les actions des locataires imprescriptibles.
III) Un encadrement du loyer et des charges répercutables sur les locataires :
– Le loyer
Le législateur a supprimé le recours à l’indice du coût de la construction (ICC) au profit des indices des loyers commerciaux (ILC) et des activités tertiaires (ILAT) pour la révision triennale du loyer et le plafonnement du loyer de renouvellement.
La loi Pinel a surtout prévu qu’en cas de déplafonnement du loyer en cours de bail ou lors de son renouvellement, « la variation de loyer qui en découle ne peut conduire à des augmentations supérieures, pour une année, à 10% du loyer acquitté au cours de l’année précédente. ».
– Les charges : Formalisme et nouvelle répartition plus favorable au locataire
a) Tout bail commercial devra désormais comporter :
– un inventaire des charges et d’impôts, taxes et redevances liés à ce bail, comportant l’indication de leur répartition entre le bailleur et le locataire. Chaque année cet inventaire devra faire l’objet d’un état récapitulatif transmis au locataire dans un délai fixé par voie réglementaire à compter de la clôture de l’exercice considéré.
– un budget prévisionnel des travaux devant intervenir jusqu’à la première échéance triennale ainsi qu’un état récapitulatif des travaux réalisés au cours des trois exercices antérieurs qui devra préciser leur coût. Un nouveau budget prévisionnel devra être fourni par la suite par le bailleur à chaque échéance triennale.
En cours de bail, le bailleur devra également informer le locataire des charges, impôts, taxes et redevances nouveaux.
b) Dorénavant, un contrat de bail commercial ne peut plus prévoir l’imputation au locataire l’un des cinq postes suivants :
IV Durée du bail commercial
– La durée ferme :
La loi Pinel interdit désormais aux parties de stipuler une durée ferme dans un bail commercial sauf dans les quatre cas suivants :
– si le bail a une durée contractuelle supérieure à neuf ans ;
– si le bail porte sur des locaux construits en vue d’une seule utilisation (hôtel par exemple);
– si le bail est à usage exclusif de bureaux ;
– si le bail porte sur des locaux de stockage mentionnés au 3° du III du Code général des impôts.
– Modalités du congé :
La loi Pinel a assoupli les règles de forme du congé, en ouvrant aux parties la possibilité de donner congé soit par acte extrajudiciaire, soit par lettre recommandée avec demande d’avis de réception (LRAR). Ce nouveau formalisme est applicable aux congés délivrés depuis le 20 juin 2014.
En revanche, à défaut de modification de l’article L. 145-10 du code commerce, la demande de renouvellement du preneur et la réponse du bailleur à cette demande continuent d’être soumises au formalisme de l’acte extrajudiciaire.
V) Une nouveauté : Un droit de préemption du locataire en cas de vente du local commercial
A l’instar des baux d’habitation, la loi PINEL accorde sauf exception, au locataire un droit de priorité en cas de vente du local dans lequel il exploite son fonds de commerce.
En pratique, si le propriétaire bailleur vend les murs, le locataire commerçant en est informé
– par lettre recommandée AR
– par lettre remise en main propre contre récépissé ou émargement
Le preneur sera prioritaire pour en faire l’acquisition pendant un mois.
Cette notification valant offre de vente au profit du locataire, doit lui indiquer le prix et les conditions de vente envisagées par le bailleur (article L 145-46 alinéa 1er du Code du Commerce).
Cette disposition légale n’étant pas d’ordre public, les parties peuvent s’y déroger conventionnellement dans le contrat de bail impliquant dès sa conclusion une renonciation du locataire à sa mise en œuvre.
Un second droit de préférence est prévu si le propriétaire décide de vendre à des conditions ou à un prix plus avantageux que ce qu’il avait initialement proposé à son locataire.
Les habitudes et les matrices doivent changer.
Pour l’essentiel, les règles nouvelles sont venues anéantir les créations des praticiens qui avaient laissé libre court à leur imagination, étant observé que les règles d’ordre public étaient finalement peu nombreuses.
La loi veut protéger les preneurs et leur permettre de mieux connaître l’étendue de leurs engagements.
La fixation du loyer intial au juste prix devient donc un enjeu majeur pour le bailleur.
Plus que jamais, la plus extrême rigueur dans la rédaction du bail est nécessaire.
Le conseil d’un expert avisé sera un plus.
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