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La clause d’indexation du bail commercial prévoyant que le loyer ne peut être révisé qu’à la hausse est nulle

ParEtienne CHEVALIER - Avocat en droit immobilier

La clause d’indexation du bail commercial prévoyant que le loyer ne peut être révisé qu’à la hausse est nulle

Comment le loyer d’un bail commercial évolue-t-il ? Les parties peuvent-elles prévoir cette évolution ? Peuvent-elles indexer le loyer du bail commercial sur un indice ? Surtout, le bailleur peut-il imposer au preneur une clause d’indexation prévoyant que le loyer ne peut être révisé qu’à la hausse ?

Le loyer du bail commercial a vocation à évoluer (à la hausse ou à la baisse) en considération de la valeur locative. Ce mécanisme de révision légale se nomme la révision triennale, est d’ordre public, et implique la saisine du TGI.

Toutefois, à côté de ce mécanisme, les parties peuvent stipuler dans leur bail une clause dite d’échelle mobile, qui fait varier le loyer en fonction d’un indice et d’une périodicité choisis par les parties. Cette clause présente un caractère automatique, en ce sens qu’il n’est pas nécessaire de saisir le juge pour qu’elle produise ses effets.

S’il est acquis de longue date que les indexations fondées sur le SMIC, ou sur l’évolution générale des prix sont interdites, la question s’est récemment posée de savoir si par une telle clause, il était possible de prévoir que le loyer ne pourrait être révisé qu’à la hausse ?

Pour la première fois, la Cour de cassation a eu à se prononcer sur la question de la validité de telles clauses qui, jusqu’à cet arrêt, divisait les juridictions du fonds.

C’est ainsi que le 14 janvier 2016, la 3ème chambre civile de la Cour de cassation (Cass. 3e civ. 14 janvier 2016 n° 14-24. 681) a eu l’occasion de conclure à la nullité des clauses d’indexation stipulant que le loyer ne pouvait être révisable qu’à la hausse :

« Mais attendu, d’une part, qu’est nulle une clause d’indexation qui exclut la réciprocité de la variation et stipule que le loyer ne peut être révisé qu’à la hausse ;qu’ayant relevé, par motifs adoptés, que la clause excluait, en cas de baisse de l’indice, l’ajustement du loyer prévu pour chaque période annuelle en fonction de la variation de l’indice publié dans le même temps, la cour d’appel, qui a exactement retenu que le propre d’une clause d’échelle mobile était de faire varier à la hausse et à la baisse et que la clause figurant au bail, écartant toute réciprocité de variation, faussait le jeu normal de l’indexation, a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision ;

Attendu, d’autre part, que, sans dénaturer la convention, la cour d’appel, qui a apprécié souverainement le caractère essentiel de l’exclusion d’un ajustement à la baisse du loyer à la soumission du loyer à l’indexation, a pu en déduire que la clause devait être, en son entier, réputée non écrite ».

Pour se prononcer en ce sens, la Cour régulatrice prend donc appuie sur deux textes :

Tout d’abord, c’est l’article L. 112-1, alinéa 2, du Code monétaire et financier, dont il n’est pas anodin de relever le caractère d’ordre public (TGI Paris, 4 juill. 2013: Administrer oct. 2013. 42, obs. Sainturat) :

« Est réputée non écrite toute clause d’un contrat à exécution successive, et notamment des baux et locations de toute nature, prévoyant la prise en compte d’une période de variation de l’indice supérieure à la durée s’écoulant entre chaque révision ».

Par cet article, « le législateur a seulement entendu écarter les clauses visant à organiser délibérément une distorsion en prenant en compte une période de variation de l’indice supérieure à la durée s’écoulant entre chaque révision afin d’éviter que les bailleurs ne procèdent ainsi à un rattrapage du loyer, et non prohiber la référence à un indice de base quel que soit l’usage qui en est fait » (TGI Paris, 4 juill. 2013: Administrer oct. 2013. 42, obs. Sainturat).

En effet, si l’indice devait diminuer, cela aboutirait à geler la clause permettant l’indexation du loyer, en sorte que le loyer ne pourrait être révisé selon la période de révision initialement prévue.

Dans un second temps, la 3ème chambre civile s’appuie sur l’article L145-39 du Code de commerce, selon lequel :

« En outre, et par dérogation à l’article L. 145-38, si le bail est assorti d’une clause d’échelle mobile, la révision peut être demandée chaque fois que, par le jeu de cette clause, le loyer se trouve augmenté ou diminué de plus d’un quart par rapport au prix précédemment fixé contractuellement ou par décision judiciaire ».

 La Cour de cassation retient que le propre d’une clause d’échelle mobile est de faire varier le loyer à la hausse ou à la baisse, et qu’en conséquence la clause prévoyant que le loyer ne pouvait être augmenté qu’à la hausse était nécessairement nulle.

À propos de l’auteur

Etienne CHEVALIER - Avocat en droit immobilier

Je conseille des professionnels de l'immobilier dans le cadre d'acquisition et de cession d'immeubles. J'accompagne également des clients particuliers désireux de se constituer un patrimoine solide, générateur de revenus réguliers grâce à des investissements ciblant des immeubles de rapport ou des supports destinés à être mis en valeur et exploités. Mon goût personnel et ma formation professionnelle m'ont conduit à développer une compétence particulière en matière de résolution amiable de situations litigieuses ou conflictuelles. J'interviens régulièrement à l'occasion de conflits entre associés ou entre indivisaires. Mes clients apprécient mon sens de l'organisation, mon implication dans les dossiers et la création d'une relation construite sur la confiance.