La question revient souvent et elle a pour origine une mauvaise anticipation de l’évolution d’un investissement immobilier fiscalisé à l’impôt sur le revenu (détention directe ou SCI IR).
Nous examinerons successivement la genèse du problème et les solutions disponibles.
La fiscalité étudiée est celle de la fiscalité applicable aux revenus perçus par le propriétaire d’un immeuble assujetti à l’impôt sur le revenu.
Il peut s’agir d’un propriétaire personne physique détenant l’immeuble « en direct » ou de l’associé d’une société civile assujettie à l’IR (on parle de transparence fiscale).
En cas de détention par l’intermédiaire d’une société civile, les revenus sont censés être perçus directement par l’associé (d’où la terminologie de transparence fiscale).
En ce qui concerne le mode d’imposition, celui-ci peut être schématisé de la manière suivante :
Le revenu taxable correspond à la somme des loyers encaissés diminué des charges déductibles.
La différence entre les sommes encaissées et les sommes décaissées est ajoutée à l’ensemble des autres revenus du contribuable et taxée à l’impôt sur le revenu comme l’ensemble des autres revenus.
Il est donc possible que les revenus fonciers subissent une très lourde taxation à l’impôt sur le revenu (si le contribuable est taxé dans les tranches les plus hautes du barème).
A cette fiscalité à l’IR, s’ajoute la « fiscalité de la CSG ».
Il arrive fréquemment que des investisseurs immobiliers se voient confrontés à d’importantes difficultés financières après quelques années de détention de l’immeuble lorsque l’investissement atteint son point de retournement.
La notion de point de retournement correspond à la date à laquelle les charges déductibles ne permettent plus de constater un déficit foncier et que les revenus locatifs encaissés sont supérieurs au montant des charges décaissés et qu’il existe donc un résultat foncier bénéficiaire.
En général, cette situation comptable et fiscale ne correspond pas à la réalité de la trésorerie puisque les revenus fonciers par définition ont servi à rembourser les échéances de l’emprunt contracté par l’acquisition de l’immeuble mais dont seule la partie correspondant aux intérêts du prêt est déductible.
L’investisseur se retrouve donc dans l’obligation de financer au moyen de ses autres revenus le montant de l’imposition applicable aux revenus fonciers nets déclarés.
Cette situation n’est pourtant absolument pas imprévisible et elle peut mais surtout doit être anticipée.
Mécaniquement, une opération assujettie à l’impôt sur le revenu ne conduira à aucune imposition durant les 6 à 10 premières années (en fonction de l’importance du déficit foncier) mais il est impossible d’une opération se maintienne durablement dans un schéma de déficit foncier.
L’objet des développements ultérieurs se limite à énumérer et à présenter des solutions pouvant permettre de diminuer le montant de l’imposition des revenus fonciers.
Solution n°1 : la fuite en avant
La solution de la fuite en avant correspond à la stratégie consistant à augmenter ou à faire apparaître un déficit foncier en investissant à nouveau.
Le mode de fiscalisation des revenus fonciers permet de globaliser l’ensemble des recettes (loyers) et l’ensemble des charges et dépenses déductibles pour de ne déclarer que le solde.
Ainsi, si le contribuable dispose de revenus fonciers nets conduisant à une imposition de ses revenus fonciers sur le revenu, il peut neutraliser son imposition en réalisant de nouveaux investissements assujettis à l’IR qui provoqueront l’apparition de charges déductibles et un déficit foncier.
Le risque inhérent à cette stratégie est qu’elle ne règle pas le problème et ne fait que le décaler dans le temps.
Plus la fuite en avant durera, plus le montant des impôts à acquitter le moment venu sera significatif.
La stratégie de la fuite en avant peut cependant se justifier si une projection financière précise est réalisée et qu’elle permet à l’investisseur de gagner le temps nécessaire au désendettement des premières opérations assujetties à l’IR et donc de lui donner la possibilité d’utiliser les revenus locatifs des opérations chronologiques les plus anciennes pour faire face à l’imposition sur le revenu.
En règle générale, les revenus locatifs des opérations les plus anciennes ne suffisent pas pour couvrir la totalité des sommes dues au titre des impôts.
Il est possible dans certaines circonstances de souscrire un emprunt complémentaire permettant de donner à l’investisseur les liquidités nécessaires pour faire face à l’imposition en attendant que les premiers emprunts soient remboursés.
Une fois les emprunts intégralement remboursés, et en ajustant sa stratégie d’investissement au niveau des impôts prévus ou prévisibles, l’investisseur disposant d’un patrimoine immobilier assujetti à l’IR pourra alors facilement neutraliser ses impôts fonciers et faire grossir son patrimoine.
Toute la difficulté de l’investissement immobilier vient du financement à crédit des investissements et que l’imposition de revenus affectés au remboursement d’un emprunt.
Stratégie alternative
Dans le même registre, les charges déductibles peuvent être augmentées en procédant à des opérations d’amélioration ou de rénovation des immeubles.
Cela étant, cette stratégie implique très souvent la création d’une nouvelle dette ou elle absorbe des liquidités puisées dans l’épargne personnelle de l’investisseur.
Produits à fiscalité particulière
Pour mémoire, il faut citer la possibilité pour l’investisseur immobilier désireux de réduire le montant de son imposition la possibilité de faire l’acquisition de produits répondant à des caractéristiques spécifiques et subventionnés fiscalement.
On pense ici aux opérations Malraux, opérations DOM/TOM ou aux investissements de type Pinel.
Ces opérations constituent des formes plus subtiles de fuite en avant mais ne sont pas des solutions pertinentes ou a même de répondre aux préoccupations de l’investisseur soumis à une forte imposition de ses revenus fonciers.
En effet, en règle générale, les produits d’investissement subventionnés fiscalement sont des produits neufs acquis à crédit qui, sous réserve du respect de certaines conditions, ouvrent droit à des réductions d’impôt.
Ces réductions d’impôt sont financées au moyen d’un crédit de sorte que l’investisseur a l’illusion de réduire ses impôts mais, en réalité, il a simplement payé par anticipation ses impôts sur plusieurs années lorsqu’il a payé le prix de l’immeuble.
C’est précisément cette même stratégie de financement du besoin de trésorerie par un crédit qui a été envisagée ci-dessus.
La raison pour laquelle les produits neufs subventionnés fiscalement ne me paraissent pas être une bonne solution provient du fait que ces opérations sont vendues clé en main et que les prix sont très élevés par rapport à la côte de l’occasion.
L’impact fiscal sur les revenus est indéniable mais l’examen de la rentabilité de l’opération (prix d’achat diminué du prix de revient) est en règle générale très décevant.
L’avantage fiscal est généralement absorbé par la surcote du bien payée lors de l’achat.
Solution n°2 : Réduire les revenus fonciers
On envisage ici toutes les solutions consistant à réduire les flux de revenus encaissés par le contribuable assujetti à l’impôt sur le revenu.
Cette stratégie de réduction des revenus peut prendre diverses formes :
La fiscalité des revenus fonciers est la conséquence de la détention de l’usufruit des immeubles.
L’usufruit peut être séparé de la pleine propriété.
Les opérations conduisant à la première cession d’un usufruit sont surveillées et taxées.
La mise en œuvre de stratégies visant le transfert de l’usufruit de parts sociales de SCI à prépondérance immobilière ou d’immeubles assujettis à l’IR ou de l’usufruit d’immeubles détenus en direct ne doit pas être motivé par un unique intérêt fiscal.
Pour réduire les revenus fonciers, il est aussi possible de vendre les opérations les plus anciennes et désendettées pour réinvestir le produit de cession sur des supports à fort potentiel mais à faibles revenus.
Il pourra s’agir d’acquisitions d’immeubles dans les centres villes situés dans des zones économiques dynamiques (PARIS, LYON, LILLE, etc…).
La priorité sera paradoxalement de rechercher un rendement faible mais une bonne rentabilité.
Cela étant l’investisseur se sépare des revenus et sécurise son capital tout en pouvant espérer une bonne rentabilité si le prix du foncier évolue favorablement durant la période de détention de l’immeuble jusqu’à sa revente.
Dans le même ordre d’idée, il est possible après avoir dégagé des liquidités de faire l’acquisition d’immeubles en viager ou d’immeubles placés sous le régime de la loi de 1948 (il en existe encore).
Tous ces montages reposent sur le postulat que le revenu foncier taxé provient d’immeubles significativement désendettés.
Bien évidemment, la réduction des revenus peut aussi provenir de la cession d’un ou plusieurs immeubles dans l’unique but de réduire le flux des revenus fonciers et donc de la fiscalité applicable si le contribuable n’a pas la capacité de faire face aux impôts avec ses autres revenus.
Il est possible de procéder à une SCI à l’IS.
La vente ou l’apport de parts sociales de SCI
Pour réduire les revenus, il est possible de se séparer de la propriété des titres des sociétés civiles fiscalement transparentes.
Les titres s’ils sont cédés deviennent la propriété de la société civile à l’IS mais le contribuable doit s’acquitter d’un impôt sur la plus-value.
Dans l’hypothèse d’un apport pur et simple des parts sociales de sociétés civiles détenues à l’IR, il est possible de bénéficier d’un report d’imposition.
Il n’y a pas de durée maximum pour bénéficier du report d’imposition.
La plus-value peut être gommée si les titres reçus à l’occasion de l’apport des parts sociales sont l’objet d’une donation.
Ces opérations sont contrôlées attentivement et elles doivent donc être élaborées avec le plus grand soin par des experts.
Solution n°3 : Réduire ses autres revenus
La situation peut apparaître évidente mais il faut garder à l’esprit que l’impôt n’est exigible qu’en raison de la perception de revenus.
Si les revenus baissent, l’impôt baisse mécaniquement.
Cette situation peut se rencontrer dans l’hypothèse où l’âge de la retraite approchant, le contribuable peut anticiper une baisse significative de ses revenus.
Il est évident qu’il n’est pas conseillé de saborder délibérément une source de revenus uniquement dans le but de faire baisser les impôts (sachant que les impôts, ne correspondent qu’à une partie même si elle est importante, des revenus et ne conduisent pas à la confiscation de la totalité du revenu).
Solution n°4 : Investir à l’IS
Idéalement, il faut diversifier les régimes d’imposition tout au long de la constitution du patrimoine de l’investisseur.
L’idée est de constituer une société civile (en général) pour investir tout en optant pour l’IS.
La fiscalité IS est beaucoup plus maitrisable et se révèle d’un niveau inférieur à celle constatée pour les opérations assujetties à l’impôt sur le revenu mais cette situation favorable s’inverse totalement dans l’hypothèse de la revente de l’immeuble après une durée de détention.
La fiscalité de la plus value constatée à l’occasion de la vente d’un immeuble dans le régime IS est nettement plus pénalisante que la taxation des plus-values des immeubles imposés à l’IR.
Cela étant, bien qu’un frottement fiscal soit inévitable, il est possible de réduire la fiscalité applicable aux revenus fonciers en réalisant des apports d’immeubles en pleine propriété à des sociétés civiles assujetties à l’IS (ce qui implique que les opérations soient désendettées) ou de faire l’apport de parts sociales de sociétés civiles fiscalisées à l’IR.
Ces opérations ne sont pas neutres et bien évidemment ne doivent pas être motivées par le seul souhait de réduire la fiscalité applicable aux revenus fonciers.
Solution n°5 : Opter pour le régime du meublé
Force est de constater que la fiscalité applicable aux revenus fonciers tirés de la location nue d’immeubles est, toute proportion gardée, supérieure à la fiscalité constatée au titre des locations soumises au régime des meublés.
Si les revenus sont limités et respectent les plafonds, les revenus tirés de location de meublés font l’objet d’un abattement de 50% qui n’a pas à être justifié (forfait).
Cela étant, il est parfois plus intéressant d’opter pour le régime réel sachant qu’en cas de dépassement des seuils prévus pour le régime micro, l’activité sera imposée selon le régime réel.
La bascule sous le régime du meublé (loueur en meublé non professionnel) se révèle particulièrement performante pour les opérations dégageant de faibles charges déductibles.
Moyennant un investissement certes réel mais supportable, les revenus fonciers dégagés des locations meublées sont fiscalisés sur la moitié seulement, soit une proportion sensiblement inférieure à la base taxable dans le cadre de location nue.
Il faut toutefois veiller à respecter les conditions fiscales sous peine de subir un redressement à l’occasion de la bascule du régime du meublé.
En effet, lors du changement fiscal consécutif au passage du revenu foncier au BIC, le bailleur doit remplir la condition suivante : avoir dégagé sur les trois précédents exercices fiscaux un bénéfice foncier sur le bien visé par le changement de régime fiscal.
Ainsi si un déficit foncier sur le bien visé par le changement a été constaté au cours des trois derniers exercices fiscaux, le bailleur doit en informer l’administration fiscale et procéder au remboursement de l’économie d’impôt procuré par l’imputation de ce déficit.
Conclusion
Il existe des solutions pour diminuer le montant de l’imposition des revenus fonciers.
Leur mise en œuvre et leur sélection nécessitent une vigilance tout à fait particulière.
Pour investir dans l’immobilier, faites-vous conseiller.
Etienne CHEVALIER
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